Temps de lecture : 8 minutes

Est-ce que ça vous est déjà arrivé de finir une journée et d’avoir beaucoup de mal à vous remémorer précisément ce qu’il s’est passé ?
Dans les grandes lignes vous avez tout mais dans le détail, c’est plus compliqué ?

Ou de faire une sortie dans la nature, et, à la fin de la journée, de ne vous souvenir que de quelques observations, rencontres et paysages, mais d’avoir oublié beaucoup de choses ?

Personnellement, ça m’arrive très souvent.

En général, le jour d’après ça devient encore plus compliqué de se remémorer la journée et une semaine ou un mois après il ne reste presque plus rien …

C’est plutôt frustrant parce quand on regarde en arrière, on se souvient finalement de très peu de choses par rapport à tout ce qu’on a vécu et on a l’impression que le temps file et nous échappe.

Depuis que je dessine, une chose m’a frappé par rapport aux souvenirs qui nous restent : la différence entre une journée passée sans dessiner et une journée passée à faire quelques dessins d’observations.

C’est sous cet angle que je voudrais vous parler du dessin aujourd’hui.

Nous allons voir pourquoi le dessin et la prise de notes sont particulièrement intéressants pour mieux se souvenir de son quotidien et de ses découvertes et comment faire en pratique.

Bonne lecture ! 🙂

Pourquoi on oublie nos observations nature

Plus un souvenir est vieux, plus c’est difficile de s’en souvenir. Je pense qu’on en a tous fait l’expérience.

Se souvenir de ce qu’on a fait la veille est encore plus ou moins facile, mais dire précisément ce qu’il s’est passé dans notre journée il y a une semaine ou un mois, c’est une autre affaire …

La mémorisation dépend de différentes choses mais elle obéit à cette règle toute simple : une information qui n’est pas réutilisée finit par être oubliée.

Le cerveau juge cette information comme non utile et fait donc de la place pour du nouveau.

Ce phénomène à été étudié et est représenté par la « courbe de l’oubli« .

C’est sur ce principe que repose la « répétition espacée » qu’utilise différentes techniques de mémorisation et applications d’apprentissage (Duolingo pour les langues, Anki pour l’apprentissage en général, etc) : une information à apprendre est répétée à des pas de temps réguliers pour être mémorisée.

Nous avons donc besoin d’une « ancre », quelque chose sur quoi s’accrocher pour tirer le fil et retrouver un souvenir.

C’est ce qu’il se passe quand on a quelque chose sur le bout de la langue et qu’un petit indice permet de retrouver le souvenir par exemple.

Mais alors, comment fabriquer cette ancre pour retrouver nos souvenirs ? Et quel est le rôle du dessin là dedans ?

Voyons ça tout de suite dans la prochaine partie.

Courbe de l'oubli qui montre la quantité d'information d'un souvenir retenu en fonction du temps

« Courbe de l’oubli » : chaque « révision » d’un souvenir le raffraichit et l’ancre à plus long terme (Wikimédia)

Se souvenir de ses balades : l’impact du dessin et de la prise de notes

Prendre des notes permet de se souvenir. Simplement quelques mots clés ou idées clés permettent de retrouver l’idée qu’il y avait derrière.

C’est notre fameuse « ancre » dont on a besoin.

C’est vrai pour un cours, une conférence ou un livre que l’on a lu.

Si on ne prend pas de notes pendant ou au moins après une conférence ou un chapitre de livre, on se souviendra peut-être d’une impression générale, mais rapidement, une journée ou quelques jours plus tard, on risque d’avoir tout oublié.

Le cerveau n’a rien pour retrouver le souvenir et il finit par s’effacer.

C’est vrai pour la prise de notes mais c’est aussi vrai pour la vie au quotidien : si on a pas de traces, « d’ancre », on finit par oublier.

C’est la même chose pour la nature : sans trace, à la fin d’une journée pendant laquelle on a fait une longue balade, il reste quelques souvenirs peu précis, le lendemain il ne reste pas grand chose, et au bout d’une semaine il ne reste plus rien.

Au-delà des connaissances, on peut oublier aussi les impressions, les pensées, les émotions que l’on a eu à ce moment.

Dans la prochaine partie, je vous propose de voir concrètement comment utiliser le dessin et la prise de notes pour mieux se souvenir 🙂.

Carnet ouvert vide sur une table

Le bon vieux carnet et stylo sont les meilleurs alliés pour se souvenirs … à l’aide de mots mais aussi de dessins ! (Pixabay)

Comment utiliser le dessin et la prise de notes pour se souvenir

Pourquoi dessiner et prendre des notes aide à mieux mémoriser

D’après différentes études récentes, le dessin est une des meilleures approches pour mémoriser 1-4.
Il permet notamment de mieux observer et d’être plus attentif, ce qui est essentiel pour mieux mémoriser 3 .

Un dessin constitue aussi un support visuel qui montre ce qu’on a observé : c’est notre « ancre » qui permet de retrouver un souvenir.

Textes et dessins sont très complémentaires : un texte permet de noter des pensées, des réflexions, des perceptions sensorielles (sons, odeurs, etc) alors que le dessin permet d’être beaucoup plus précis pour l’aspect visuel.

Un texte pour ce côté sera moins précis et sera toujours un peu sujet à interprétation.

Le dessin et le texte utilisés ensemble permettent donc de noter précisément ses souvenirs et expériences.

Ils permettent d’avoir cette impression d’une vie plus pleine et plus riche quand on regarde en arrière puisque plus pleine de souvenirs.

Page de nature journaling notes avec mots et dessins

Associer croquis et texte est une bonne manière de noter une observation ! Les croquis peuvent être rapides et simples, plus qu’ici 🙂

3 conseils pratiques pour utiliser le dessin et la prise de notes pour se souvenir

Nous allons voir 3 conseils pratiques pour utiliser le dessin et la prise de notes pour mieux se souvenir :

  1. Dessiner tous les jours
  2. Changer de rapport au dessin
  3. Un carnet comme compagnon

Dessiner tous les jours

J’ai détaillé un peu plus dans cet article 5 conseils pour dessiner tous les jours.
Ces conseils sont :

  • 1. S’engager
  • 2. Être flexible en adaptant votre pratique au temps que vous avez,
  • 3. Se concentrer sur le processus du dessin plutôt que sur le résultat (j’y reviens juste après),
  • 4. Varier les techniques et outils,
  • 5. Se faire plaisir (j’y reviens aussi un peu plus juste après).

Si vous suivez ces 5 conseils, vous devriez arriver à dessiner tous les jours sans problème 🙂.

Je voudrais revenir sur le conseil que j’ai pu voir le plus souvent, qui me paraît vraiment important.

Les dessinateurs expérimentés que j’ai pu entendre parler de ce qui leur permettait de dessiner depuis aussi longtemps régulièrement avait tous leurs propres astuces mais étaient tous d’accord sur un point : pour dessiner régulièrement et pour ne pas abandonner il faut se faire plaisir en dessinant.

D’après différents spécialistes5-8 ce qui motive nos comportements est la recherche de plaisir et le fait d’éviter une peine.

En partant de là, vous pouvez adopter 2 petites stratégies si vous voulez dessiner régulièrement et utiliser le dessin pour mieux vous souvenir :

  • 1. Vous demander pourquoi vous voulez dessiner, qu’est ce que vous aimez dans cette activité et le rechercher consciemment en dessinant
  • 2. Vous demander ce que ça vous apporte et que vous n’auriez plus si vous ne dessinez plus.

Changer son rapport au dessin

Personnellement, ce que je trouve dans le dessin est d’apprendre à mieux observer, découvrir des choses en ralentissant et en étant plus attentif, et me souvenir de mes observations.

Si on prend la chose dans l’autre sens, ne pas dessiner fait que je me souviens de très peu de choses, ou que mes souvenirs sont assez vagues.

J’ai alors l’impression que mes journées filent à toute allure et c’est assez frustrant.

Le contraste est assez frappant entre les journées où je dessine et les journées où je ne dessine pas.

Si ces idées ne vous parlent pas, vous pouvez bien-sûr trouver vos propres motivations, avec ce que vous apporte le dessin en terme de plaisir ou ce que le fait de dessiner vous permet d’éviter.

L’important est de sortir de l’idée de faire absolument quelque chose de beau, ce qui peut mettre de la pression, frustrer et faire abandonner.

Cette approche du dessin fonctionne pour moi donc peut être qu’elle pourra vous aider aussi 🙂.

Le carnet de croquis : l’outil clé pour garder une trace de vos balades

Combien de dessins j’ai fait rapidement sur des feuilles volantes et j’ai fini par perdre …

Le carnet est un compagnon de route qui vous permettra de garder précieusement vos observations et vos souvenirs.

Il peut trouver une place dans un sac ou dans une poche pour vous accompagner au quotidien.

L’idée est de noter ce que vous observez pour vous en souvenir, il n’y a aucune pression de résultat.

Personnellement, il faut que je me répète ça à chaque fois que je prends mon carnet pour ne pas avoir peur de la page blanche. C’est vraiment important pour utiliser votre carnet régulièrement.

Si vous avez un peu de pression avant de démarrer, vous pouvez très bien utiliser une partie de votre carnet (la fin par exemple) pour vous échauffer en faisant quelques lignes et gribouillis avant de prendre des notes sur ce que vous voulez mémoriser.

Si vous ne notez pas quelque chose, vous finirez par l’oublier, ce qui serait dommage.
Peu importe donc si votre croquis n’est pas incroyable, ce n’est vraiment pas le but.

Enfin, pensez à associer les mots et les croquis pour enrichir vos notes et vos souvenirs.

Prise de notes sur un carnet ouvert

Observation et mémorisation en cours 🙂 (Pexels)

Pour finir

Que ce soit pour noter des choses à la volée, ou pour prendre le temps de ralentir, observer et faire des découvertes, le dessin et la prise de notes sont des outils précieux.

Ils peuvent réellement enrichir votre vie en la remplissant de souvenirs et de découvertes au quotidien.

Il n’y a pas forcément besoin de partir en vacances, de changer d’endroit, pour rencontrer de la nouveauté et faire des expériences, tout ça est accessible au quotidien.

Pour démarrer, un simple carnet, qui trouvera une place dans une poche ou dans un sac, et un crayon sont suffisants.

Rappelez-vous bien de l’objectif : prendre des notes et dessiner pour mieux observer et pour vous souvenir, cela enlèvera de la pression et vous permettra de vous lancer.

Ensuite, faites-vous plaisir et allez-y pas à pas.

Puisque vous êtes arrivé jusqu’ici, je vous invite vraiment à vous lancer dès maintenant, à prendre un carnet, ligné ou non ligné, un crayon ou un stylo et d’utiliser ces 2 approches, le dessin et le texte, pour explorer votre quotidien et votre environnement et mieux vous en souvenir.

Tous les jours sont une occasion d’apprentissage et de découvertes, ça en vaut vraiment la peine 😉.

Pour en savoir plus sur cette approche, vous pouvez aussi explorer la pratique du Nature journaling, qui associe les mots, les croquis et les chiffres, pour apprendre à mieux observer et retenir ses découvertes. 

N’hésitez pas à me faire un petit retour ou partage en commentaires juste en dessous, je suis curieux de savoir si ces idées vous parlent et vous ont donné envie de vous lancer.
Je répondrai à vos questions avec plaisir 🙂.

Bonne journée pleines d’observations et de découvertes,
A très vite !

Ressources et références

(1) Wammes, J.; Meade, M.; Fernandes, M. The Drawing Effect: Evidence for Reliable and Robust Memory Benefits in Free RecallQ. J. Exp. Psychol. 2006 201569, 1–62. https://doi.org/10.1080/17470218.2015.1094494

(2) Meade, M. E.; Wammes, J. D.; Fernandes, M. A. Drawing as an Encoding Tool: Memorial Benefits in Younger and Older AdultsExp. Aging Res. 201844 (5), 369–396. https://doi.org/10.1080/0361073X.2018.1521432.

(3) Martinez, S.; Wenger, É.; Raut, J. La mémoire est un jeu, Illustrated édition.; Premier Parallèle: Paris, 2018.

(4) Murre, J. M. J.; Dros, J. Replication and Analysis of Ebbinghaus’ Forgetting CurvePLOS ONE 201510 (7), e0120644. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0120644.

(5) Kahneman, D. (prix Nobel d’économie, psychologue cognitiviste), ; Clarinard R., Système 1 / Système 2: Les deux vitesses de la pensée, Flammarion, 2012

(6) Skinner B. F. (comportementaliste)

(7) Damasio A. (neuroscientifique), L’Erreur de Descartes : la raison des émotions, Odile Jacob, 2010

(8) Bentham J. (philosophe) « La nature a placé l’humanité sous la gouvernance de deux maîtres souverains : la douleur et le plaisir« 

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