Si vous tenez un carnet d’observation nature, faites du Nature journaling ou dessinez en extérieur, vous avez sûrement parfois rencontré une difficulté : la page blanche.
Ne pas savoir par quoi commencer, manquer d’inspiration ou de motivation, ou avoir peur de raturer, peuvent faire partie des principaux obstacles qui empêchent de sortir son carnet et de dessiner régulièrement.
C’est alors ce qui peut vous empêcher de progresser et risque au final de vous faire abandonner cette activité.
Comment dépasser cet obstacle, pour réussir à observer et dessiner la nature régulièrement, se faire plaisir et progresser en continu ?
C’est ce que je vous propose de voir dans cet article dans lequel nous allons voir 6 stratégies faciles à mettre en place.
Premier obstacle : une question d’état d’esprit
Aborder le dessin en extérieur et la pratique du Nature journaling dans un objectif artistique / esthétique peut mettre beaucoup de pression.
A la moindre rature, on peut alors se décourager, et perdre le plaisir de simplement observer la nature, découvrir des choses et les capturer dans son carnet.
C’est le grand avantage de cette activité et celui que j’essaye de toujours garder en tête quand je commence : se souvenir que cette activité permet de mieux observer, être plus curieux, plus attentif, se souvenir de ses observations et faire des découvertes sur le vivant qui nous entoure.
Quelque chose qui n’est pas pris en note, même rapidement, finit par être oublié. C’est vrai aussi pour vos observations nature.
Votre carnet peut être un vrai coffre au trésor qui garde toutes les rencontres et découvertes nature que vous avez faites.
Si vous ne les prenez pas en note, vous finirez par les oublier.
De la même manière, si vous ne faîtes pas de dessin, vous ne progresserez pas.
La première stratégie que je vous propose est donc de vous rappeler, à chaque fois que vous commencez à dessiner en extérieur, prendre des notes et faire du nature journaling, l’état d’esprit ou l’objectif que vous pouvez vous fixer (s’il vous parle bien-sûr 🙂) : apprendre à mieux observer, être plus curieux, plus attentif, faire des découvertes et s’en souvenir.
Cette approche peut enlever la pression qui peut exister si vous cherchez absolument à faire quelque chose de beau ou d’artistique.
Bon, cette approche est la base mais elle ne suffit pas forcément …
Je vous propose donc de voir quelques stratégies en plus, faciles à mettre en place, pour dépasser l’obstacle de la page blanche.
5 stratégies simples pour démarrer facilement
1. Noter les « métadonnées »
Mais qu’est ce que c’est que ça vous demandez-vous peut-être ?
Il s’agit simplement de premières informations qui permettent de donner du contexte à vos observations.
Concrètement, il s’agit de la date, du lieu, etc.
C’est une manière facile, rapide et très utile de commencer à poser quelque chose sur votre feuille blanche. La nature change, en fonction du lieu, de la période de l’année, de la météo, de l’heure de la journée …
Si vous ajoutez ces informations, qui sont rapides à noter, à vos observations, elles prendront vraiment une autre dimension. Vous pourrez dire qu’à tel moment de l’année, à tel endroit, vous avez observé cette plante, cet oiseau ou ce comportement.
Ça pourra donc vous informer sur l’espèce : où elle vit, son mode de vie (période de floraison, période de migration pour les différentes espèces d’oiseaux, période de nidification, etc), et vous permettre de suivre vos observations dans le temps (« il y a 5 ans j’ai observé cette espèce chez moi et je ne la vois plus depuis », …).
Voici quelques idées de choses utiles à noter :
- La date
- Le lieu : vous pouvez être plus ou moins précis en indiquant par exemple la commune, la localité, le nom d’un parc ou d’une forêt, voir les coordonnées GPS (accessibles sur Google Maps par exemple) ou en faisant une petite carte simple de l’endroit.
- La météo : ensoleillé, un peu couvert, nuageux, pluvieux, … avec de petits pictogrammes par exemple,
- L’heure
- Éventuellement la vitesse du vent (nul, faible, moyen, fort, par exemple).
Vous pouvez noter des informations dans un petit encadré pour les regrouper ensemble et les retrouver rapidement visuellement.
Voyons tout de suite la 2ème stratégie, pour lever encore un peu la pression du perfectionnisme, et utiliser les dessins plus facilement.

Ces informations sont rapides à noter et sont vraiment très utiles !
2. Faire des croquis et schémas
Un schéma est un dessin simplifié de ce que vous observez.
L’idée est de ne représenter que l’information que vous souhaitez prendre en note et retenir.
Vous oubliez donc volontairement de nombreux détails, qui rendraient le dessin moins clair au niveau de l’information prise en note, et plus long et plus difficile à réaliser.
Sur ce principe, vous pouvez par exemple vous concentrer sur des détails spécifiques que vous observez et faire de petits dessins pour les représenter.
Ça vous évitera par exemple de devoir prendre en compte des questions de proportions si vous faites un dessin de l’ensemble du sujet (une plante, un oiseau, etc), ce qui prendrait du temps et risque de vous frustrer en demandant à corriger et recommencer plusieurs fois en cas d’erreur.
Plutôt que de faire un dessin complet et précis d’un oiseaux, vous pouvez par exemple vous concentrer sur des détails et faire différents petits dessins : un dessin simple du bec, un autre de la forme des pattes, un autre de l’aile, etc
Pour une plante, vous pouvez faire un schéma simplifié global et faire des dessins de parties séparées : une feuille, un pétale, une fleur, …
Pour faciliter encore l’adoption d’un état d’esprit « dessin utile » plutôt que beau dessin, vous pouvez aussi utiliser un stylo ou un feutre.
Le côté non effaçable vous obligera à lâcher le perfectionnisme et à simplifier vos croquis pour ne vous concentrer que sur ce que vous voulez montrer et retenir.
Et si on a l’impression de tourner un peu en rond ? De ne pas trouver de sujet intéressant à dessiner ?
Avec les 2 prochaines stratégies, je vous propose de voir comment explorer n’importe quel sujet d’une manière différente, pour faire des découvertes, même dans ce qui semble le plus ordinaire.

L’organisation d’une fleur peut être montrée facilement et rapidement avec de petits croquis
3. Zoomer et Dézoomer
Ici, nous allons faire comme si nous avions un zoom : l’idée est d’observer notre sujet depuis différents points de vue.
Trois points de vue principaux sont possibles :
- Un point de vue globale, avec une vue du sujet dans son ensemble,
- Un point de vue rapproché : on regarde un détail en particulier de très près,
- Un point de vue éloigné ou on voit le sujet dans son environnement.
Chacun de ces points de vue peut être pris en note dans votre journal nature.
Pour le point de vue global, une bonne astuce est de faire un dessin à l’échelle (mais pas besoin de vous balader avec un carnet géant si vous dessinez des arbres 😉) pour vous rendre compte de la taille réelle de ce que vous avez observé.
Pour ça, une manière toute simple de faire si vous le pouvez est de poser le sujet sur votre page et de tracer ses contours avec un crayons léger ou mettre des points de repères pour fixer ses dimensions.
Pour la vue zoomée, vous pouvez utiliser différentes stratégies pour indiquer qu’un dessin est un zoom d’une partie d’un autre.
Voici quelques exemples :

Effets loupe pour montrer quelques détails
Enfin, pour la vue dézoomée, vous pouvez très bien faire un dessin simplifié de l’environnement, simplement pour comprendre comment est située cette espèce par rapport à d’autres.

Difficile de faire plus simple mais au moins ça fonctionne 🙂
Une autre stratégie peut vous permettre d’explorer d’une manière neuve un sujet que vous connaissez : devenir un expert.
4. Devenir expert d’un sujet
L’idée est d’observer votre sujet (une plante, un insecte, un arbre, un oiseau, …), comme si vous vouliez devenir un vrai expert, quelqu’un d’incollable dessus.
Pour ça, il faudra donc l’observer attentivement : faire des vues plus ou moins zoomées, comme nous avons vu, mais aussi étudier les formes, la taille (si possible), les proportions, le comportement, …
Vous pouvez reprendre la démarche du Nature journaling : noter un maximum d’observations, puis vous poser des questions pour aller plus loin et faire des découvertes.
Stratégies pour mieux observer et noter vos observations
Voici quelques stratégies utiles pour observer et prendre des notes :
- Zoomer et dézoomer comme nous l’avons vu dans la partie précédente,
- Faire des vues en coupe (forme d’une tige, intérieur d’un fruit, forme d’une pierre, …),
- Changer de point de vue (vue du dessus, de côté, de 3/4, …),
- Mesurer,
- Etudier les couleurs, les formes, les textures, et les prendre en notes (avec des mots et des dessins).

Vous pouvez jouer avec les points de vues, faire des zooms, indiquer des mesures, …

Et faire des vues en coupe
Faire des découvertes en se posant des questions
Se poser des questions change absolument tout : ça vous permet d’être plus curieux, de mieux observer, et de faire de nombreuses découvertes.
L’idée n’est pas de trouver la question géniale, ou de répondre à toutes les questions que vous vous posez.
Dans un premier temps, on cherche surtout à ne pas se limiter.
Suite aux observations faites, on note toutes les questions qui nous passent par la tête (comme un « brainstorming » de questions en quelques sortes).
Ce n’est qu’après que l’on prendra le temps de se concentrer sur celles qui sont les plus marquantes ou intéressantes à explorer.
Certaines questions pourront être répondues tout de suite, en faisant de nouvelles observations, d’autres pourront être gardées au chaud pour plus tard, puisqu’elles demanderont peut-être de faire d’autres observations dans un autre endroit ou à un autre moment de l’année ou de la journée.
Pour vous aider, vous pouvez partir des 6 questions souvent utilisées en journalisme pour situer rapidement un contexte :
- Qui : quelle espèce j’observe ? qui a fait cette trace au sol ? à qui appartient cette plume ? …
- Quand : De quand date cette trace ? Que s’est-il passé avant ? Que va-t-il se passer ensuite ? Quand cette plante fleurit et produit des fruits ? …
- Quoi : Que se passe-t-il ? Quel comportement j’observe ? Que fait cet animal ?
- Où : D’où vient cet oiseau ? Où niche-t-il ? Où dort ce hérisson ? Où se déplace-t-il la nuit ? …
- Comment : Comment cette plante survit aux conditions du milieu (soleil, sécheresse, prédateurs, etc) ? Comment ces oies s’orientent-elles ? Comment cette coccinelle trouve des pucerons ? …
- Pourquoi : Pourquoi cet arbre est-il tordu ? Pourquoi les grenouilles chantent ? Pourquoi les oiseaux chantent plus le matin ? Pourquoi cette fleur qui pousse en forêt fleurit-elle très tôt dans l’année ?
Répondre aux questions de type « Pourquoi »
Les questions de type « pourquoi » ont une petite particularité : elles n’ont pas de réponses uniques et sûres à 100%.
Alors, comment y répondre ?
La solution consiste à faire des hypothèses.
Ici aussi, la première chose à faire est de noter toutes les explications auxquelles on peut penser, et de garder une dernière possibilité, pour une explication à laquelle on aurait pas pensé. L’idée va ensuite être de se demander, pour chaque explication trouvée : « Qu’est ce que je devrais observer si cette hypothèse est correcte ?« .
On fait alors de nouvelles observations. Si ces observations correspondent à notre prédiction, cela va dans le sens de notre hypothèse, si ce n’est pas le cas, on peut la rayer et passer à l’hypothèse suivante. On se retrouve alors avec une liste d’explications plus ou moins probables (celles qui n’ont pas été rayées). Cette approche ne permet pas d’être sûr à 100% de la réponse trouvée mais elle vous permettra d’explorer un peu plus votre sujet, « d’enquêter », et de faire des découvertes en apprenant à mieux connaître ce que vous étudiez.

Pourquoi cet arbre est tout tordu ?
Et si vous n’avez pas beaucoup de temps ? Ou s’il reste encore un peu de pression de vouloir faire quelque chose de quand même un peu joli ?
C’est le moment de voir comment faire avec la 5ème et dernière stratégie : faire des dessins express.
5. Faire des dessins express
Le principe est de se donner un temps court pour faire un dessin : 1 minute, 2 minutes, … et de s’y tenir
Ce temps vous restreindra et vous empêchera de vous attarder sur les détails.
Il enlèvera aussi pas mal de pression par rapport au résultat attendu.
Pour ça, vous pouvez faire un petit encadré (6cm sur 6cm par exemple), choisir votre sujet, définir un laps de temps pour votre dessin, lancer un minuteur et dessiner 🙂.
De cette manière vous pouvez multiplier les petits dessins sur un temps assez court.
Cela vous permettra d’apprendre à observer et capturer rapidement un sujet (ce qui est utile pour les animaux par exemple), et de prendre en note différents éléments sur un temps court.
Vous pourrez par exemple multiplier les points de vue d’un même sujet pour prendre en note des vues de côté, de haut, d’ensemble, des vues rapprochées, … ou prendre en note rapidement différents éléments d’un milieu (plantes, feuilles, paysage, animaux, …) pour vous en souvenir.
Pour en savoir un peu plus sur cette approche, vous pouvez faire un tour sur cet article plus complet. Vous y trouverez plus de détails sur comment appliquer cette stratégie et quels sont ses avantages 🙂.
Conclusion
La page blanche peut être un vrai obstacle qui empêche de dessiner et prendre des notes régulièrement quand on se balade dans la nature.
Les stratégies que nous avons vu devraient vous permettre de varier les approches, redécouvrir le vivant proche de chez vous, et dépasser le perfectionnisme et la peur de rater et de ne pas faire un beau dessin.
En pratiquant régulièrement, vous apprendrez à mieux observer la nature, être plus curieux, faire des découvertes (et les retenir), et progresser en dessin.
Ces stratégies devraient vous aussi vous permettre d’apporter un peu de variété dans votre pratique et, ce qui est le plus important, continuer à vous faire plaisir en dessinant et découvrant la nature.
Plein d’autres approches sont possibles. Un journal nature est avant tout un espace personnel d’expérimentation et de créativité.
Vous pouvez vous inspirer de ce que font d’autres personnes mais vous n’avez pas besoin de suivre un modèle fixe.
Vous pouvez ajouter de la couleur, varier les outils et techniques utilisées, mixer les approches (lettering, dessins style cases de BD pour raconter un comportement observé, croquis, dessins de paysage, poésie, …) : toutes les approches sont bonnes pour prendre en note vos observations et découvrir toujours un peu plus la nature qui vous entoure.
Pour en savoir plus sur la pratique du Nature journaling, vous pouvez faire un tour sur cet article et télécharger le guide gratuit juste en dessous.
Et si vous avez des questions, remarques ou partages, rendez-vous dans l’espace commentaires juste en dessous, j’y répondrai avec plaisir 🙂.
Bons dessins, bonnes observations, et à très vite !
Ressources
– Enfin, John Muir Laws, un auteur, éducateur et naturaliste américain partage de nombreuses ressources sur le nature journaling et le dessin nature sur son site et sur sa chaîne YouTube
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- 3 étapes pour capturer et retenir vos découvertes nature
- Comment utiliser vos 5 sens pour découvrir les merveilles de la nature et enrichir vos dessins
- Quel matériel choisir pour démarrer le dessin et l’observation de la nature
- Comment exprimer votre créativité et explorer différentes techniques de dessin
